L’Europe est devenue « l’homme malade » de l’économie mondiale. Cette faiblesse n’avait pourtant rien d’inéluctable : elle a été provoquée par les politiques économiques mises en œuvre au niveau européen. L’Union met-elle aujourd’hui en œuvre les trois principes énoncés par Jacques Delors : « La concurrence qui stimule, la coopération qui renforce et la solidarité qui unit » ?
La concurrence, sans aucun doute.
En matière de solidarité, on constate également certains progrès. À l’occasion de la crise financière puis de celle des dettes souveraines, la création d’un Fonds européen de stabilisation financière, auquel succèdera un Mécanisme de stabilité financière, consacrent des avancées importantes dans le sens d’une organisation plus solidaire.
S’agissant de la coopération en revanche, le scepticisme l’emporte. Pourtant, c’est d’elle que dépendent en premier lieu le dynamisme économique de l’Union à long terme, et donc en définitive sa place dans le monde de demain. Des experts évaluent aujourd’hui à moins de 1% la croissance potentielle de l’Union quand la croissance mondiale semble atteindre spontanément 4% et celle de la Chine près de 10% !
À ce rythme, une marginalisation de l’économie européenne, à terme, serait à craindre. Ainsi, selon une étude du CEPII, la part de l’Union Européenne dans le PIB mondial en valeur pourrait reculer de 30% aujourd’hui à 11% en 2050. Ce n’est pas une quelconque fatalité démographique ni « une préférence européenne pour le loisir », évoquée par certains, qui permettent d’en rendre compte, mais bien une insuffisance en matière de productivité et d’innovation
Cette faiblesse structurelle résulte en grande partie de l’absence de véritable coordination économique au service d’une politique de croissance européenne. Comment en sortir ? L’assainissement budgétaire et les « réformes structurelles », consistant à aligner tous les pays sur une même norme, ne sauraient être la solution. On voudrait en faire un préalable au retour de la croissance et une panacée universelle, alors que cette tâche est en pratique toujours inachevée. C’est prendre le problème à l’envers.
En vérité, c’est plutôt la croissance qui permettrait de résoudre les difficultés dites structurelles de l’Union Européenne, dans le domaine des finances publiques comme de l’emploi ou de l’innovation, ce qu’avait illustré la reprise de la fin des années 90. Il faut à l’Europe une politique macro-économique offensive, qui envisage de manière symétrique déficits et excédents, prévenant et corrigeant les excès de la demande mais aussi les cas d’insuffisance de celle-ci.
S’il est aisé de condamner les errements grecs, il n’en va pas de même par exemple de l’Espagne qui n’a connu de dérapage ni des salaires ni des comptes publics. Celle-ci a surtout souffert de ce que l’on appelle un « décalage conjoncturel » – mais peut-on reprocher à une économie en rattrapage de ne pas croître aussi lentement qu’une Allemagne dressée sur ses freins ?
L’Europe a besoin d’orientations éventuellement divergentes selon les Etats et les moments, mais toujours cohérentes et coordonnées. De fait, les déséquilibres constatés aujourd’hui sont pour l’essentiel internes. Le mal est dans l’Union, le remède s’y trouve aussi. C’est ce que tente de démontrer Daniel Vasseur dans son essai « Le déclin économique de l’Europe »
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